Venet à Versailles
L'exposition vue par...
... Bernar Venet
« Lorsque Jean-Jacques Aillagon m’a proposé d’investir le Château de Versailles, j’ai pris cette invitation comme une grande chance d’exposer mes sculptures, mais aussi ma conception de l’espace. Avant même qu’un programme d’exposition d’artistes contemporains n’existe à Versailles, c’est un lieu qui m’attirait beaucoup et bien avant l’exposition Jeff Koons, j’ai réalisé des photomontages de mes sculptures sur le site. Des projets que j’ai gardés secrets à côté d’un certain nombre de « vues idéales » de mon travail. Durant l’âge d’or de Versailles, on aurait appelé ces montages des « caprices », dans mon cas il s’agissait de « caprices » sculpturaux et non plus architecturaux.
Je vois dans Versailles des espaces ouverts et immenses, des perspectives à perte de vue. C’est à la fois le lieu idéal pour installer mes sculptures et un véritable challenge de se retrouver confronté à un paysage sublime et grandiose. Mes Arcs doivent s’y intégrer sans se perdre dans l’espace, pour cela de nombreux paramètres sont à prendre en considération, c’est pourquoi j’ai tenu à réaliser de nouvelles sculptures pour cette exposition, les adaptant à la topologie et à l’échelle du lieu.
Il était évident que je n’allais pas m’installer à l’intérieur du Château, mes sculptures ne s’y prêtent pas, alors qu’elles trouvent toute leur plénitude dans les allées des jardins de Le Notre. Je pense à ces levers et couchers de soleil dont la lumière dorée va mettre en valeur le rouge-brun de l’acier corten.
Les courbes de mes sculptures contrasteront avec la géométrie angulaire des jardins tandis qu’elles accompagneront les contours circulaires du bassin d’Apollon et du Grand Canal. »
Bernar Venet
... Jean-Jacques Aillagon« En 2011, c’est donc Bernar Venet qui est l’invité du château de Versailles.
Il y succède à Takashi Murakami qui a, on le sait, suscité, en 2010, auprès d’un large public, un intérêt considérable.
En choisissant Bernar Venet, le château de Versailles souhaite mettre en valeur l’œuvre d’un artiste français dont le travail, intense et rigoureux, ne cesse de poser la question de la relation de l’art avec le paysage et l’architecture et donc également avec le temps et l’histoire. Par ailleurs et pour la première fois, l’Établissement a fait le choix de présenter l’une des œuvres de l’exposition annuelle d’art contemporain dans le domaine de Marly dont il a désormais la responsabilité.
Tout cela me réjouit d’autant plus que j’ai pour Bernar Venet une ancienne et très amicale considération. C’est un artiste qui ne cesse de défricher sa propre œuvre et qui, trait de caractère tout à fait remarquable, sait porter sur les œuvres des autres artistes un regard attentif et pertinent. »
Jean-Jacques Aillagon
Ancien ministre
Président de l’Établissement public du château,
du musée et du domaine national de Versailles... Bernard Marcadé
« En 1961, lors de son service militaire à Tarascon, Bernar Venet réalise une performance où on le voit couché au milieu de détritus. C’est sa première œuvre revendiquée. Plus de 50 ans après cette action, l’artiste occupe la cour d’honneur et les jardins du château de Versailles, à l’aide de ses Arcs, de ses Lignes indéterminées et de ses Effondrements en acier Corten. L’ouvrage, réalisé à l’occasion de cet événement, retrace le parcours visuel d’un artiste protéiforme qui, de l’art conceptuel à l’art public, a fortement marqué le paysage esthétique contemporain, avec ses peintures, ses installations, ses performances, ses sculptures monumentales, mais aussi ses écrits.
Dans le catalogue publié à l’occasion de l’exposition, l’essai de l’artiste et critique d’art Brian O’Doherty s’attache à analyser la contribution de Bernar Venet aux grands questionnements de l’art et de la sculpture de notre temps. Au travers d’un récit étoilé et polyphonique, Bernard Marcadé met en perspective la figure singulière de l’artiste dont l’extrême rigueur n’exclut en aucune manière la liberté formelle. »
Bernard Marcadé
Commissaire de l’exposition
Présentation des œuvres
Sous le commissariat de Bernard Marcadé, l’exposition comprend un ensemble de 7 œuvres exposées dans les jardins du Château de Versailles et dans le Domaine de Marly.
86.5° Arc x 16 – Place d’Armes
Neuf lignes obliques – Domaine de Marly-Le-Roi86.5° Arc x 16 – Place d’Armes
Cette première sculpture n’est pas réservée au Château mais est offerte à la ville qui la perçoit depuis la perspective de l’avenue de Paris. Créée spécifiquement pour le lieu, elle offre une double vision. D’abord cernant la statue équestre de Louis XIV, elle la surplombe nettement, puis passée celle-ci se découvre une nouvelle perspective, la sculpture encadre le château qu’elle domine. Sorte de parenthèse intermédiaire, sas de décompression, elle se situe entre deux échelles : l’échelle humaine amplifiée de la statue de Louis XIV et l’échelle monumentale de l’architecture de Mansart. Entre les deux, les arcs s’élèvent à 22 mètres de hauteur.
5 groupes d’Arcs 214.5°, 215.5°, 216.5°, 217.5°, 218.5° – Parterre du midi
C’est l’expression la plus littérale des Arcs de Bernar Venet. Ils se dressent imbriqués les uns dans les autres et formant presque un cercle. La forme complète, permet de souligner dans leur prisme la perspective bousculant le passage, ils se dirigent vers les points cardinaux.
Trois lignes indéterminées – Parterre du midi
Déroulant sa ligne sur le parterre du midi au dessus de l’Orangerie et dans la perspective de la pièce d’eau des Suisses, la sculpture pointe vers le Château en soulignant l’axe nord-sud.
219.5° Arc x 28 – Parterre d’Eau
Face au Château, les arcs se penchent sur le Parterre d’Eau confrontant les spectateurs à la matérialité de la sculpture qui semble se courber au dessus d’eux. Cette impression est renforcée par les dimensions des Arcs qui surplombent les visiteurs.
Effondrement : 225.5° Arc x 16 – Bassin du Char d’Apollon
Entre le bassin d’Apollon et le Grand Canal les minces arcs ploient et s’effondrent, sans ordre prédéfini, selon les hasards de l’équilibre et de la gravité.
219.5° Arcs x 13 – Bassin du Fer à cheval
En rappel du parterre d’eau, deux groupes d’Arcs ponctuent l’extrémité du bras secondaire du Grand Canal devant le bassin du Fer à Cheval surplombé par le Trianon.
Neuf lignes obliques – Domaine de Marly-Le-Roi
S’élevant dans les jardins qui autrefois abritaient le château construit par Jules-Hardouin Mansart pour les instants de loisir de Louis XIV, les lignes verticales de Bernar Venet prennent la place de la construction aujourd’hui disparue.
Biographie de l'artiste
Bernar Venet est né en 1941 à Château-Arnoux Saint-Auban dans les Alpes de Haute Provence. Il vit et travaille à New York et en Hongrie.
Débutant sa carrière en 1961 en enduisant ses toiles d’une couche de goudron et en exposant une sculpture composée d’un simple tas de charbon, le travail d’avant-garde de Bernar Venet est très vite encouragé par les tenants de la scène artistique française : Arman, César, Jacques Villeglé…
S’emparant de New York en 1966 il découvre l’art minimal et poursuit dans son travail l’expérience des plans de tubes en ne reproduisant des images scientifiques que pour leur sens et l’évocation de leur formule. L’image neutre est dégagée de l’intervention de l’artiste et de la subjectivité de son regard. Il expose aux côtés des tenants de l’art minimal et conceptuel : Sol LeWitt, Donald Judd, Carl Andre, Dan Flavin… dans les galeries Dwan, Paula Cooper… Il met alors au point un programme de 4 ans s’intéressant aux différentes branches de la science et au terme duquel il prévoit d’arrêter sa carrière artistique. En 1971, arrive la fin programmée de la carrière de Bernar Venet qui se consacre alors à des rétrospectives de son travail, à des conférences à travers le monde ainsi qu’à une série de cours à la Sorbonne.
Le travail qu’il reprend finalement à partir de 1976 poursuit son attachement aux formules mathématiques et prend un tournant formaliste aussi bien en peintures qu’en sculptures. Le hasard étant mathématique, il décline des séries de sculptures intitulées « lignes indéterminées » suivant le parcours de la main sans recherche esthétique particulière, sans pattern prédéfini. A la suite de celles-ci, il développe des sculptures composées d’arcs qui mettent en espace les degrés qui à la fois les définissent et les composent. Se déployant en acier corten, les « arcs » de Bernar Venet développent une matérialité et un sens de leur environnement. Les lignes à travers leurs variations : Arcs, Arcs penchés, Arcs verticaux, effondrements… composent le vocabulaire de Venet qui par leur intermédiaire aborde les problématiques de la sculpture : rapports au corps, à l’équilibre, rapports à l’espace environnant…
Il se fait connaître du grand public en exposant ses sculptures à travers le monde : Paris…
A Versailles, Bernar Venet investit les jardins du Château, espace classique, hautement géométrique et régit par les règles de perspective. Pleinement conscient de la portée symbolique du lieu, il l’aborde avec le souhait de souligner son tracé, de révéler sa cohérence de faire redécouvrir ses espaces quitte parfois à s’inscrire en opposition avec son dessin si précisément délimité en plaçant par exemple un effondrement d’arc entre le bassin d’Apollon et le Grand Canal, sorte d’épave non pas informe mais antiformelle trônant au centre de l’ouvrage d’art par excellence qu’est Versailles.
Informations pratiques
Du 1er juin au 1er novembre 2011, 7 œuvres monumentales sont exposées dans les Domaines de Versailles et de Marly
Accès et tarifs
Pour les œuvres exposées dans les jardins de Versailles :
- L'exposition est gratuite, sauf les jours des Grandes Eaux musicales (tous les samedis et les dimanches, ainsi que certains jours de la semaine) et les jours de Jardins musicaux (certains mardis)
détail des jours de Grandes Eaux et Jardins musicaux- Accès par la cour d’Honneur du château de Versailles
- Horaires des jardins de Versailles
Pour l'œuvre exposée au Domaine National de Marly
- L'exposition est gratuite
- Accès gratuit par l’entrée principale du parc
- Horaires des jardins de Marly
Autour de l'exposition : le catalogue
Publié aux Éditions du Regard, le catalogue de l’exposition s’intéressera à l’ensemble de la carrière de Bernar Venet.L’essai de l’artiste et critique d’art Brian O’Doherty s’attache à analyser la contribution de Bernar Venet aux grands questionnements de l’art et de la sculpture de notre temps. Au travers d’un récit étoilé et polyphonique, Bernard Marcadé met en perspective la figure singulière de l’artiste dont l’extrême rigueur n’exclut en aucune manière la liberté formelle.