Mariage du pop art de Jeff Koons et du classicisme de Versailles
STEPHANE DE SAKUTIN/AFP/Getty Images
L'exposition Jeff Koons Versailles se tient du 10 septembre au 24 décembre 2008
AFP
10 septembre 2008
Les noces entre le classicisme du château de Versailles et les œuvres pop de l'artiste américain Jeff Koons ont été célébrées mercredi en présence d'un public parfois séduit, parfois dubitatif mais pas outre-mesure choqué.
Dix-sept œuvres monumentales de cet artiste sont présentées dans les appartements royaux et les jardins, dans le cadre de l'exposition Jeff Koons Versailles, qui se tient du 10 septembre au 24 décembre. Une première en France où il n'y a jamais eu d'exposition consacrée à ce plasticien, le plus coté des artistes vivants avec le Britannique Lucian Freud.
Se promenant avec lenteur dans les allées du château, entouré d'une cour de photographes, journalistes et de caméraman de divers pays, Jeff Koons a assuré à l'AFP qu'il ne se sentait pas pour autant "le roi de Versailles". "Mais je me sens très heureux d'avoir cette opportunité d'exposer mon travail", a ajouté l'artiste de 53 ans.
"C'est un rêve devenu réalité", a déclaré le sculpteur, vêtu d'un élégant costume gris clair, en se tournant vers son œuvre "Split Rocker", composée de 90.000 petites fleurs qui forment un animal étrange – mi-tête de poney, mi-tête de dinosaure.
"En faisant cette pièce, j'étais pensé que c'était le type d'œuvre que Louis XIV aurait pu, un matin en se réveillant, souhaiter avoir. Et le soir c'était chose faite", a déclaré l'artiste au visage lisse et souriant.
L'exposition, qui présente des œuvres des années 80 à nos jours, vise à éveiller des correspondances entre l'œuvre baroque de l'artiste et le château de Versailles, classé au patrimoine mondial de l'Humanité.
L'idée de l'exposition, "c'est qu'à partir d'un moment, on regarde le château différemment", explique Laurent Le Bon, un des commissaires de cette manifestation.
"Quand on voit Split Rocker sur le parterre de l'Orangerie, on redevient attentif à ce dernier, on cesse de considérer que c'est un simple décor que l'on regarde de façon inattentive", relève Jean-Jacques Aillagon, président du domaine de Versailles.
Globalement, le public n'a pas trop mal réagi à cette irruption de l'art contemporain chez le Roi-Soleil. Deux jeunes Japonaises trouvent "très intéressant la confrontation entre l'ancien et le moderne".
Fabienne, une quadragénaire nîmoise, estime que "cela permet d'égayer les appartements royaux". Mais elle n'apprécie pas vraiment "Lobster", le homard géant en aluminium pendu dans le Salon de Mars. "J'ai vraiment l'impression que c'est un objet de plage qu'on a oublié", dit-elle.
Pour une sexagénaire australienne, en revanche, c'est clair, c'est net : ces œuvres contemporaines "n'ont pas leur place dans un tel lieu".
Une manifestation d'opposants traditionalistes devant les grilles du château n'a rassemblé qu'environ 80 personnes. Pas vraiment de quoi faire une nouvelle révolution.
"Jeff Koons s'est fait connaître en montrant son sexe et présenter ses œuvres est un outrage à Marie-Antoinette", a lancé le leader des manifestants, l'écrivain Arnaud-Aaron Upinsky.
Jeff Koons, qui fut l'époux de la Cicciolina, star du porno italien, a créé des œuvres explicites autour de la "tentation et du désir" dans les années 90. Mais aucune d'elles n'est montrée à Versailles.
Ancien trader, Jeff Koons ne souhaite pas commenter sa cote très élevée. "Le dialogue entre l'art et l'argent ne m'intéresse pas. Ce qui m'intéresse, c'est le dialogue entre l'art et le potentiel humain. Mon travail tourne autour de l'optimisme", souligne-t-il.